Incomplète

De Résilience. Photo de Mariam Armisen

J’ai découvert qu’il est plus facile d’écrire que de parler. Je me sens encore inutile, et désespérée. Mais en même temps je m’en veux de me sentir de cette manière. Tant de gens sont malheureux dans le monde et je sais profondément que je n’ai pas le monopole de la souffrance. Encore les pensées morbides m’envahissent. Je tente de les enfouir, de les oublier mais c’est en vain. Les mots négatifs frappent mon esprit avec force et je ne peux rien y faire. Tels des mini tornades ils déchiquettent mon corps comme si il n’était rien.

J’ai mal, je pleure pour ma mère ou pour ce quelqu’un qui verra derrière mes yeux la vérité, pour ce quelqu’un qui m’aimera. Et j’ai de plus en plus la conviction qu’il n’existe pas. Personne ne voudra me faire sienne. Et cette pensée d’un avenir solitaire me tourmente. Après tout qu’est-ce que la réussite, la richesse, la reconnaissance, la famille, si cette seule personne n’existe pas. Je ne pense pas que je serai complète un jour sans mon autre moitié. Quand l’on dit que les autres choses devraient être prioritaires ce n’est pas vrai, c’est un mensonge. Parce que je peux mourir demain, dans dix minutes, dans une seconde, et l’argent ne comblerait pas ce sentiment de vide, ce sentiment de ne pas avoir vécu.

Est-ce trop demandé que de ne plus être seule, de ne plus ressentir ce manque. Je suis droguée et en manque et pourtant, je ne connais pas ma drogue. Encore elle m’étrangle depuis que je sais ce que signifie le mot aimer.

Je l’attends, patiemment.

Est- elle femme ?

Est- elle homme ?

Et si cela n’avait pas d’importance. Dis-le à la société ! Cette société qui m’écrase de ses règles, de ses attentes. Et moi en vain j’attends. Je sais pourquoi je ne te trouve pas. Tu te caches dans ces larmes que je verse sur ma sexualité, tu te caches derrière les regards d’une mère déçue, tu joues de moi comme d’un violon cassé. Oui je te cherche, et je sais que derrières ses cloisons, tu m’attends. Femme ! J’écrie Femme. Mais je n’ai pour moi que ton genre. Toujours tu m’échappes.